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mercredi 4 juillet 2012

Le coffre des consuls_02


(1783-1791)

En 1783, plusieurs personnes, de passage dans l’église d’Aubière, constatent la présence inhabituelle et suspecte de plusieurs hauts personnages de la paroisse autour du banc-coffre des consuls renfermant les archives rassemblées par les paroissiens et leurs édiles depuis des temps immémoriaux.
Ce fait troublant alimente aussitôt les conversations, mais aucun évènement officiel ne vient mentionner et mettre sur la place publique ce « scandale ». Bientôt, on finit par oublier l’incident.

Les interrogatoires se poursuivent…

[Continuation de la dite instruction du 10 août 1789]

Témoin n°7
Jacques Joubert, curé de la paroisse de Saint-Cirgues près d’Issoire, y habitant, âgé d’environ 37 ans.
Dépose qu’il y a plusieurs années, sans pouvoir se rappeler l’époque que, demeurant au lieu d’Aubière en qualité de vicaire de la paroisse, et étant venu à la sacristie de l’église paroissiale, il entendit faire beaucoup de bruit dans ladite église, il s’approcha et remarqua que le nommé Gioux maréchal à Aubière enfonçait un coffre qui était dans ladite église. Il en demanda le motif et on lui répondit que l’on avait perdu la clef ; quoiqu’il ne soit pas bien mémoratif de ce qui se passa, il se rappelle cependant qu’ayant regardé dans le coffre, il y vit beaucoup de papiers qui étaient très bien en ordre. Il se rappelle que ledit nommé Desribes, homme d’affaire de Mr André, seigneur d’Aubière, était présent, et sans pouvoir l’assurer, il croit que Jean Cohendy dit Mallet était également présent. Il ne peut se rappeler qu’il y vit d’autres personnes et il ne vit point qu’il fut emporté aucun papier en sa présence, et au surplus il ne s’en rappelle pas. Il peut se faire qu’il se retira avant eux.
Qui est.

Banc-coffre des consuls d'Aubière :
les trois compartiments ouverts.

[Continuation du 12 août 1789]

Témoin n°8
Marie Herbaud Bontems, femme de Pierre Chirol dit Roudait, tailleur d’habits, habitante du lieu d’Aubière, âgée de 31 ans (1).
Dépose sans pouvoir bien s’en rappeler, il y a environ sept ans, qu’étant un peu incommodée, elle se rendit à l’église paroissiale entre midy et une heure ; elle y aperçu Mr André, seigneur d’Aubière, le nommé Desribes, son homme d’affaire, le nommé Jean Cohendy dit Mallet et le nommé Gioux, maréchal, les deux derniers habitants d’Aubière ; ledit maréchal heurtait beaucoup sur un coffre servant de siège aux consuls en exercice, ledit coffre fut ouvert. Mr André sortit du coffre un rouleau de papier qu’il examina et ensuite il le mit sous son bras. Ils parlèrent tous quelques moments ensemble et sortirent de l’église avec ledit rouleau de papier.
Qui est.

[Continuation du 14 août 1789]

Témoin n°9 et dernier
Gilberte Chatanier, femme d’Annet Brun, laboureur, habitante du bourg de Lempdes, âgée de 31 ans (2).
Dépose qu’il y a environ six ans, que faisant sa prière dans l’église paroissiale à Aubière d’où elle est originaire, elle s’aperçu que le nommé Gioux, maréchal à Aubière, enfonça un coffre de la dite église qui servait de siège aux consuls et où étaient renfermés les papiers de la commune d’Aubière. Cette opération se faisait en présence de Jean Cohendy dit Mallet d’Aubière, du nommé André Tiennon, continuellement journalier chez Mr André, seigneur d’Aubière. Et la déposante croit que le nommé Desribes, homme d’affaire dudit seigneur d’Aubière, y était. L’on sortit dudit coffre les papiers qui étaient dans un sac, lequel fut emporté par ledit André Tiennon, qu’elle croit se nommer Moinarde, qui est tout ce qu’elle dit savoir.
Lecture à elle faite de sa déposition a dit icelle contenir vérité et y a persisté.

*

Interrogatoire fait devant sieur Dijon, président du Tribunal
À Antoine Desribes, homme d’affaire du sieur André, habitant du lieu d’Aubière.

Interrogé de son nom, âge, qualité et demeure :
A répondu : Antoine Joseph Desribes, originaire du lieu de Saint-Cirgues, régisseur du sieur André, habitant du lieu d’Aubière, âgé d’environ 34 ans.

Avons fait faire lecture au répondant des 4 premiers articles de l’édit de juillet 1773 et, après les lui avoir donné à entendre, il a déclaré élire domicile en la maison de Mr Barre, juge de paix, son conseil.

Interrogé si dans l’année 1783 il ne vint pas avec le sieur André chercher pendant deux fois consécutives le nommé Michel Gioux, maréchal, habitant du lieu d’Aubière, pour enfoncer les coffres de la commune d’Aubière placés dans l’église paroissiale :
A répondu qu’en ladite année, le sieur André ayant été assigné par le ci-devant Bureau de Finance pour produire les aveux et dénombrement de la cy-devant Terre d’Aubière, plusieurs particuliers dudit lieu prétendirent que les limites de leur territoire s’étendait jusqu’à la Maie et le Maréchal, que le sieur André n’ayant rien trouvé dans ses titres qui fut relatif à ce tènement, les consuls d’alors et le sindic dirent qu’il était possible que les titres de la commune donnassent à cet égard quelques éclaircissements ; qu’alors ils se rendirent avec lui répondant et le sieur André un jour qui fut fixé dans l’église paroissiale où étaient déposés les coffres de la commune ; que les clefs ne s’étant pas alors trouvées, lui, répondant, ne se souvient pas s’il fut lui-même chercher le nommé Gioux maréchal, mais il se rappelle que ce maréchal vint dans l’église et fit l’ouverture des coffres sans rien briser attendu qu’ils étaient mal fermés.

Interrogé si le nommé Gioux maréchal, ayant refusé de se rendre à l’église, lui, répondant, et le sieur André ne furent pas dans le fenière et le prenant par les cheveux ne le forcèrent pas à les suivre dans l’église :
A répondu que le fait était faux et que ledit maréchal se rendit à l’église à la première réquisition qui lui en fut faite.

Interrogé si lui, répondant, et le sieur André n’emportèrent pas tous les papiers de la commune :
A répondu que ni lui ni le sieur André n’emportèrent aucun papiers ; que les papiers furent lus et visités en présence du sindic et des consuls et remis ensuite dans ledit coffre ; qu’ayant ensuite aperçu un sac de papier qui était au-dessus du tambour, ce sac et ses papiers furent emportés au cy-devant château d’Aubière et que n’y ayant rien observé qui fut relatif au tènement dont il est question, ils furent remis à la place d’où ils avaient été tirés.

Interrogé pourquoi lui, répondant, ou tout autre fut chercher un maréchal pour enfoncer ledit coffre :
A répondu qu’on envoya de la part du sindic chez plusieurs consuls les uns après les autres pour demander la clef dudit coffre et que cette clef n’ayant pas été apportée, tous les assistants prirent le parti de faire ouvrir par le maréchal ledit coffre.

Avons observé au répondant que ses réponses ne sont pas conformes aux charges et aux formations :
A répondu avoir dit la vérité et y a persisté.
Lecture à lui faite de son interrogatoire, a dit icelui contenir vérité et y a persisté.

À suivre…

Notes :
(1) – Marie Arbobontens, née le 21 juin 1759, fille de Victor et Antoinette Deperes, mariée le 11 janvier 1785 à Pierre Chirol. Fils de charron, ce dernier, tout comme ses frères, charrons ou pas, ont porté le sobriquet de « Roudait » (roudeix ou roudet) qui signifie charron (voir la Place du Roudet).
(2) – Gilberte Chatanier, née le 6 ou 7 mai 1758, fille de Jean et Gilberte Dégironde Doux, mariée 1 le 20 janvier 1781 à Paul Gioux, mariée 2 le 3 février 1789 à Lempdes (63) à Annet Brun.

Sources : Archives communales d’Aubière.

© Cercle généalogique et historique d’Aubière – Pierre Bourcheix




Voir le Journal économique de Jean-Baptiste André : Épisode 16


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